Vladimir Poutine, Iounous-bek Evkourov et Andreï Trochev au Kremlin le 28 septembre

Wagner : Pourquoi n’écoute-t-on pas ce que dit Vladimir Poutine ?

Il est difficile d’expliquer un curieux paradoxe : il est courant, à l’ouest, de considérer le président Poutine comme un terrible autocrate et pourtant personne ou presque ne semble prêter attention aux décisions qu’il prend, comme si ses paroles devaient rester lettre morte. L’actualité nous en donne un exemple éclairant avec la prétendue nomination, le 28 septembre 2023, d’Andreï Trochev dit Sedoï (le Grisonnant) à la tête des soldats du Groupe Wagner en Ukraine. « Prétendue » parce que, en réalité, cette nomination a été annoncée trois mois plus tôt, le 29 juin, et elle est devenue effective très vite après cela, le 14 juillet, comme nous l’indiquions dans l’un de nos précédents articles.

Le Maître du Haut Château : un nouvel épisode ?

Inversion des valeurs : Le Canada montre l’exemple ?

Heureusement, la mémoire de l’horreur est encore vivace quatre-vingts ans plus tard. Inutile de revenir ici sur le scandale lié à la réception du président Volodymyr Zelensky au Parlement canadien, en compagnie du Premier ministre Justin Trudeau. Le tollé mondial soulevé à juste titre par la « standing ovation » offerte par la Chambre des communes à Yaroslav Hunka, 98 ans, combattant volontaire de la 14e division Waffen-SS « Galizien » (Halytchyna en ukrainien) a, pour une fois, été suivi d’effets. Le speaker de la Chambre, Anthony Rota – qui avait invité l’ancien combattant nazi et organisé sa reconnaissance publique – s’est vu contraint de démissionner. Quant à Justin Trudeau, il a été obligé de présenter des excuses tout en expliquant qu’il avait été piégé à l’insu de son plein gré, comme un vulgaire coureur cycliste, et que tout était d’ailleurs la faute de la propagande russe ! Le ridicule ne tue pas, mais il laisse des traces, parfois indélébiles.

Luiz Inácio Lula da Silva, XI Jinping, Cyril Ramaphosa, Narendra Modi et Sergueï Lavrov au sommet de Johannesburg

Géopolitique : La franchise des BRICS

En 2023, le groupe de pays que l’on réunit sous le sigle de BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) a connu une transformation radicale. Jusqu’à récemment, la plupart des commentateurs en Occident considéraient ce groupe comme un ensemble de pays, sympathique ou antipathique selon le point de vue, mais faible et sans importance géopolitique réelle parce qu’il réunissait des puissances régionales qui n’avaient que peu en commun à part des intérêts commerciaux et, peut-être, une volonté de bouder ensemble dans leur coin en récriminant contre les États-Unis et la dictature du dollar sur l’économie mondiale. Mais jamais, croyait-on, ils ne pourraient contester l’hégémonie occidentale.

PIERRE LORRAIN

Journaliste, écrivain - spécialiste de la Russie et de l'ex-Union Soviétique