« Dans la perspective des États-Unis, la fin de partie est la défaite stratégique du président Poutine dans cette aventure[1]. » Lorsque Victoria Nuland, sous-secrétaire d’État aux affaires politiques, tint ces propos lors d’une audition devant le Sénat des États-Unis, le 8 mars 2022, l’intervention russe en Ukraine était commencée depuis moins de quinze jours. Elle exposait alors la politique du département d’État américain (l’équivalent du ministère des Affaires étrangères) selon laquelle les sanctions massives allaient provoquer un tel effondrement économique de la Russie que le Kremlin serait obligé d’arrêter une guerre qu’elle serait incapable de financer.
Comme nous l’avons vu dans notre précédent article, telle était également la position exprimée par le ministre français de l’Économie Bruno Le Maire (qui parlait de l’« efficacité redoutable » des sanctions), mais aussi par de nombreux autres responsables européens. Ainsi, à Davos, le 24 mai 2022, Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, déclarait que l’Ukraine devait gagner la guerre et que « l'agression de Poutine [devait] devenir un échec stratégique[2] ».