Le Mausolée d'Humayun à New Delhi (photo: beenaroundtheglobe.com)

OTAN/Russie : Un point de vue indien sur l'OTAN et le conflit en Ukraine

Zorawar Daulet Singh est un géopoliticien reconnu en Inde. Titulaire d’un doctorat en relations internationales du King’s College de Londres et également diplômé de l’Université Johns Hopkins (Maryland, États-Unis), il est chercheur associé à l'Institute of Chinese Studies et chercheur invité au Forum for Strategic Initiative, tous deux situés à New Delhi. Spécialiste des relations entre l’Inde et la Chine, il s’est également penché, dans son dernier livre, sur le rôle de l’Inde dans les rapports est-ouest : Power and Diplomacy: India’s Foreign Policies during the Cold War (Oxford University Press, 2019).

Dans cet article du 3 juin 2023 publié par le portail indien Money Control, le Dr Daulet Singh livre sa vision sur le conflit qui oppose l’OTAN à la Russie sur le territoire ukrainien. Il nous a semblé particulièrement intéressant de le traduire et de le publier avec l’autorisation de l’auteur (voir le texte original).  

Le grand pari de l'OTAN en Ukraine a échoué

 

Deux cents soldats ukrainiens, sur un contingent total de 859, quittent l'Académie de l'infanterie de Tolède (Espagne) à la fin de leur formation, le 3 avril 2023 (photo ABC).

Offensive ukrainienne : Les limites d’une armée hétéroclite

Depuis le début de la guerre, l’Ukraine compte sur ses soutiens occidentaux pour lui apporter un soutien global : diplomatique, financier et militaire, bien sûr, mais aussi dans le domaine du renseignement et du conseil politique. Sur ces deux derniers points les Américains se chargent de l’essentiel du travail, particulièrement dans le domaine politique où, selon l’aveu même de Mme Victoria Nuland (voir notre précédent article), ils travaillent en ce moment même à déterminer ce que sera le futur de l’Ukraine.

Évidemment, les États-Unis, le Royaume-Uni et différents pays de l’Union européenne fournissent capitaux, armes et matériels militaires sans oublier la formation des troupes. Et c’est là que se pose une question importante : celle de l’hétérogénéité que cela implique pour l’armée ukrainienne. Dans un article très intéressant publié sur son site, Larry Johnson, un ancien de la CIA et du bureau de lutte contre le terrorisme du Département d’État, s’interroge sur l’importance de l’uniformité pour l’armée ukrainienne au moment de lancer une offensive.

Victoria Nuland, porte-voix des "neocons" américains

Géopolitique : Que peut bien vouloir dire la « défaite stratégique » de la Russie en Ukraine ?

« Dans la perspective des États-Unis, la fin de partie est la défaite stratégique du président Poutine dans cette aventure[1]. » Lorsque Victoria Nuland, sous-secrétaire d’État aux affaires politiques, tint ces propos lors d’une audition devant le Sénat des États-Unis, le 8 mars 2022, l’intervention russe en Ukraine était commencée depuis moins de quinze jours. Elle exposait alors la politique du département d’État américain (l’équivalent du ministère des Affaires étrangères) selon laquelle les sanctions massives allaient provoquer un tel effondrement économique de la Russie que le Kremlin serait obligé d’arrêter une guerre qu’elle serait incapable de financer.

Comme nous l’avons vu dans notre précédent article, telle était également la position exprimée par le ministre français de l’Économie Bruno Le Maire (qui parlait de l’« efficacité redoutable » des sanctions), mais aussi par de nombreux autres responsables européens. Ainsi, à Davos, le 24 mai 2022, Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, déclarait que l’Ukraine devait gagner la guerre et que « l'agression de Poutine [devait] devenir un échec stratégique[2] ».

PIERRE LORRAIN

Journaliste, écrivain - spécialiste de la Russie et de l'ex-Union Soviétique