Couvre-feu : on se fait appeler « Arthur »

Couvre-feu : on se fait appeler « Arthur »

Pourquoi Arthur ? D’où vient cette expression du langage courant qui évoque la promesse d’un châtiment pour une faute commise. Certes, les jeunes d’aujourd’hui ne l’utilisent plus guère, mais ceux qui ont on plus de, disons, quarante ans ne peuvent que garder le souvenir de l’un ou l’autre de leurs parents levant un doigt aussi sentencieux que menaçant en disant :

— Oh, toi ! Tu vas te faire appeler Arthur !

Même la tournure de la phrase était bizarre : « se faire appeler ». Cela suggérait que le simple fait d’être affublé de ce nom était un sujet d’infamie. Mais qui pouvait être cet Arthur mystérieux dont la simple évocation laissait entendre les pires supplices. Le roi fondateur de la Table ronde et sa fameuse épée Excalibur qui pourfendait les félons ? Le célèbre écrivain Conan Doyle dont le détective fétiche découvrait à coup sûr les mauvaises actions ? Ou une évocation de la fin pathétique de Rimbaud dans l’hospice de Marseille ?

France : gestion à la soviétique de la crise sanitaire ?

France : gestion à la soviétique de la crise sanitaire ?

En ces temps troublés provoqués par la pandémie du coronavirus, il convient de rappeler un épisode tragique lié au drame de Tchernobyl qui me semble illustrer de manière éclairante le comportement des dirigeants de notre pays.

Dans ses Mémoires, Mikhaïl Gorbatchev – avec qui j’eus la chance de travailler sur leur traduction française – rapporte de manière précise comment fut créé, le 29 avril 1986, trois jours après la fusion du réacteur n° 4 de la centrale, un « groupe opérationnel du Politburo » dirigé par Nikolaï Ryjkov, alors Premier ministre. En raison du « caractère exceptionnel de l’accident », précise l’ancien président soviétique, « ce groupe, disponible en permanence, travailla sans discontinuer. Les procès-verbaux et autres documents relatifs à ses travaux ont été publiés depuis ».

En effet, après l’effondrement de l’URSS, les Izvestia y consacrèrent plusieurs numéros. Le 24 avril 1992, le journal publia le fac-similé d’un document plutôt confondant. Marqué du tampon « strictement confidentiel », il précisait que, le 8 mai 1986, quelques jours après la catastrophe, devant l’afflux considérable de personnes irradiées dans les hôpitaux de la région, le ministère de la Santé publique de l’URSS édicta de nouvelles normes de contamination, dix fois supérieures aux anciennes. Cela permit aux autorités de déclarer soudain bien portantes des personnes qui, la veille encore, étaient considérées comme irradiées.

Les intérêts de la Russie au Moyen Orient

Les intérêts de la Russie au Moyen Orient

Contribution de Pierre Lorrain à la conférence « Les Perspectives stratégiques de la Russie au Moyen Orient », organisée dans le cadre de l’Institut Catholique de Paris, 12 février 2020

 Contrairement à une vision très répandue selon laquelle les Russes seraient arrivés de fraîche date au Levant et, plus généralement, au Moyen Orient (avec, comme corollaire l’idée qu’ils n’auraient rien à y faire), Moscou bénéficie d’une longue tradition de défense de ses intérêts dans cette zone. Tradition pratiquement aussi longue que celle des deux puissances qui, à l’issue de la Première Guerre mondiale et de l’effondrement de l’Empire ottoman, avaient obtenu de la Société des Nations des mandats pour l’administration du Liban et de la Syrie (la France) et de la Palestine (le Royaume-Uni). Il est probable que, sans la révolution d’Octobre qui avait fait sortir l’Empire russe de la guerre, Saint-Pétersbourg aurait eu, au même titre que Paris et Londres, son mot à dire dans le partage des mandats sur ces territoires.

En fait, la Russie actuelle possède une tradition d’implication dans cette région du monde qui se justifie par un double héritage : celui de l’Empire tsariste et celui de l’Union soviétique.

PIERRE LORRAIN

Journaliste, écrivain - spécialiste de la Russie et de l'ex-Union Soviétique